samedi 22 juillet 2017

Les militaires vont-ils devoir la fermer ?

Ce sera, parmi d'autres sujets, un des sujets sur lequel le nouveau CEMA -et dans une certaine
mesure, le chef des armées- va devoir trouver le bon placement de curseur : l'expression des militaires. Ceci, une fois les problèmes de pouvoir d'achat réglés, ce qui laisse du temps.

On le sait, le précédent CEMA encourageait les stagiaires de l'école de guerre à livrer leur jus de crâne sur toutes sortes de sujets dans la presse nationale. Pas forcément des thèses révolutionnaires, mais on peut néanmoins constater qu'un assez large panel de sujet était traité. De même, des comptes twitter, qui n'étaient pas parodiques, se sont créés ces dernières années. Un auteur de livre ici, un penseur là, et depuis quelques mois, une vague entière de chef de corps et de commandants de brigades. Là non plus, les tweets ne renvoient pas forcément à des idées non convenues, néanmoins, au détour d'une phrase, on peut comprendre (en 140 s) parfois bien des choses différentes.
On l'a bien compris, Emmanuel Macron a signifié que les militaires devaient désormais garder leurs idées pour eux, et d'extérioriser leurs soucis. Une erreur à mon sens, car faut-il le rappeler, Jean-Yves Le Drian n'avait-il pas, lui-même, reconnu que c'est en parlant à un soldat de montagne qu'il avait découvert  l'ampleur de Louvois (1) ? C'est d'ailleurs en rencontrant les blessés, à Percy, qu'Emmanuel Macron a mesuré la nature de leur engagement. En jouant la terreur, l'exécutif risque donc de trouver des momies dans ses déplacements dans les forces. Et des applaudissements pas très nourris.
Comment le général François Lecointre va-t-il gérer ce contexte très bordé ? Il est un rédacteur historique d'Inflexions, une revue qui relie les civils et les militaires (il figure toujours dans le comité exécutif). Or, c'est donc bien dans la droite ligne -aussi- de ce que réclame la ministre quand elle veut que les milis soient bien inscrits dans la société dans laquelle ils vivent. Mais cette expression est-elle compatible avec la vision présidentielle ?
Comment gérer (si c'est possible) aussi l'expression des généraux à la retraite ? Certains avaient été listés par l'équipe Le Drian, car estampillés plutôt réfléchis et modérés. On y trouvait par exemple le général Alain Bouquin (par ailleurs chez Thales), Patrick Charaix (devenu consultant indépendant). Mais l'épisode tellurique de la semaine dernière a quasi exclusivement mis en avant deux anciens OGX qui disent avoir participé à la plateforme défense d'EM, le général Dominique Trinquand (employé dans le groupe Marck après son départ de l'armée de terre) et le général Jean-Paul Palomeros (qui a oeuvré chez le groupe de consulting CEIS après son départ de SACT). Par delà, évidemment, l'indéboulonnable général-penseur Vincent Desportes. Qui, cela n'a suffisamment pas été rappelé, avait été sèchement évincé pour un de ses écrits par Nicolas Sarkozy.
En tête des bases de données média, ce "bon client" comme on dit dans le milieu reste le plus visible parmi les commentateurs.
Le CEMA est aussi, malgré son origine terrienne, très ouvert aux APNM, ces associations professionnelles militaires conséquences de la traduction dans le droit français d'un arrêt de la convention européenne des droits de l'homme (rien de moins). L'une d'elles, l'APNair, est d'ailleurs, c'est la première, en passe de cocher toutes les cases de représentativité.
Emmanuel Macron, qui préfère voire une tête plutôt que 200.000, devra donc se conformer à la loi, qui édicte que ces APNM ont la possibilité d'éveiller les esprits, pour tout ce qui concerne la condition militaire.
Or, pour ceux qui ne l'ont pas encore bien compris, cette condition dépend de communication interne, mais aussi d'euros. Pas d'euros, pas de condition. Sans jeux de maux, ça va de soi.

(1) plus d'une année, il faut le dire, après que ce blog en ait parlé, avec plusieurs dizaines de posts...

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