mercredi 26 octobre 2016

Une revue de programmes (et des priorités) s'impose

Les documents budgétaires, mais aussi les auditions parlementaires le font comprendre, même à un
béotien : les besoins excèdent très largement les ressources disponibles.
Miser sur une hypothétique hausse du budget de la défense -qui a toujours, sur le mode déclaratif, une pléthore de partisans- à 2%, voire plus, pour retarder la décision est sans doute une erreur.
On le voit bien, même les mesures qui ont été décidées en conseil restreint de défense n'ont pas été totalement financées -même les CEM le reconnaissent-, les mesures catégorielles vont aussi devoir, rapidement, gonfler, car les militaires sont de plus en plus demandeurs (en lien avec leur sur-engagement opérationnel, et de ce qu'ils ressentent comme une "paupérisation" par rapport au reste de la société, des arguments que le ministre risque à nouveau d'entendre au prochain CSFM).
Certes, on peut proposer, comme la présidente de la commission de la défense l'a fait aux UED, d'avoir une marge de manoeuvre supplémentaire de 4 MdEUR (pour la disssuasion, le MCO, les trous dans la raquette et les effectifs).
Mais dans ce cas, pourquoi même ne pas le faire dès maintenant : les députés et sénateurs ne votent-ils pas les lois ? A-t-on déjà vu un budget de la défense -par nature insuffisant placé à l'aune de la bosse des programmes- censuré, ou très fortement amendé, pour y glisser de nouveaux besoins ?
On peut se rappeler du débarquement de la commission de la défense à Bercy, ou que l'action des sénateurs -Gautier/Reiner- a fait plier en son temps le ministre de la défense, mais ces exemples restent isolés dans l'histoire des commissions défense des deux chambres.
La présidente Patricia Adam l'a fait remarquer aux députés présents lors d'une séance, la lecture des rapports parlementaires (opex, MCO, forces spéciales...) pourrait permettre d'orienter parfois un peu mieux les travaux de la commission, voire de l'Etat, plutôt que jouer sur le registre d'un grand oral façon Sciences Po, assez déconnecté des carences réelles de l'outil de défense (qui se découvrent sur le terrain). Vous pouvez vous-mêmes vous faire un avis sur le niveau de certaines questions en découvrant ces débats ici, en gardant en tête que ces compte-rendus analytiques font l'objet de relectures de la part des personnes citées.
Sans doute le plus adroit dans sa communication sur les carences du moment, le patron de l'armée de terre a interpellé la presse sur la nécessité d'anticiper rapidement le remplacement des Gazelle, mais aussi des VAB (eux aussi quarantenaires). Il aurait pu aussi citer l'exemple du Puma qui portait jeudi le système de commandement aéroporté moderne, sorti des chaînes de la SNIAS en... 1971. Or Gazelle et Puma forment encore la majorité des parcs, tandis que la dispo des autres parcs, plus récents, ne fait pas rêver le ministre de la défense, qui multiplie les annonces sur une refonte du MCO (un vieux problème pourtant). Plusieurs élus sont également furax : Gwendal Rouillard, François Lamy, Jacques Gautier...
Bien sûr, donc, la modernisation du parc d'hélicoptères doit être lancée sans attendre, non pour sortir un fabricant d'un mauvais pas, mais bien pour sortir les armées d'un fossé qui se creuse jour après jour sur quasiment toutes les flottes des trois armées. La seule façon de régler rapidement ce problème consiste à faire l'impasse sur quelques autres, moins urgents. Donc, de passer par une revue de programme, car les hélicoptères ne sont pas les seuls concernés par ces soucis.
Car à la première situation de crise en France, on peut s'interroger sur le nombre d'hélicoptères qui serait disponible, avec, évidemment, quelques réponses pénibles à donner aux Français réfugiés sur leurs toits, piégés par les eaux (ça c'est le scénario facile). Et s'il fallait ouvrir un nouveau théâtre demain -on en ferme un ce weekend...-, il serait compliqué d'y affecter un gros volume de voilures tournantes.
L'âge canonique des voilures tournantes fait également prendre un risque à leurs occupants, mais aussi à ceux qui défilent en dessous (parfois des citoyens français même). Pour une fois, anticiper au lieu de subir (Super Frelon, Nord 262) ferait gagner tout le monde, sans risque de chicaya : les trois armées utilisent des hélicoptères.